dimanche 5 octobre 2008

Apprendre aux pauvres à faire des profits


Longtemps réfractaires au profit, les organisations non gouvernementales veulent maintenant aider les plus pauvres à en faire. Et le microcrédit n'est pas le seul moyen mis en oeuvre.
Lors d'un atelier du Forum Tremblant portant sur l'émergence de nouveaux modèles de philanthropie, l'ONG new-yorkaise Endeavor a expliqué son fonctionnement : elle cible les PME les plus prometteuses dans des pays émergents et leur fournit divers services-conseils, comme la mise en réseau, l'amélioration de la chaîne d'approvisionnement, la recherche de marché, les changements organisationnels, etc. " On ne leur donne pas de l'argent, on les aide à croître ", explique Elmira Bayrasli, directrice, partenariats, politiques et diffusion d'Endeavor. " Dans les pays en émergence, le problème n'est pas l'argent, mais plutôt le manque de confiance et de réseautage, raconte-t-elle. Car ces pays ont de grandes et riches entreprises familiales qui contrôlent tout, ce qui laisse peu de place à la classe moyenne et aux PME. De plus, la perception des affaires y est négative. Nous voulons changer cela. " De bonnes pratiques font de bonnes affaires Un autre modèle d'aide vient d'un gestionnaire de fonds de Montréal appelé Cordiant Capital. Ses investissements dans les pays en voie de développement sont fondés sur des principes de durabilité - notamment de responsabilisation des communautés locales. " De bonnes pratiques font de bonnes affaires ", a expliqué le président de la firme, David Creighton. Il a donné l'exemple d'un projet d'usine pétrochimique au Nigeria, où il était impossible d'obtenir une assurance. On a résolu le problème en donnant 5 % des actions aux populations déplacées, 5 % aux employés, et 10 % aux habitants du village. De cette façon, c'est la communauté qui s'assure que les installations du projet ne seront pas attaquées. Le troisième modèle de soutien au développement économique des populations défavorisées est courant au Québec : l'entrepreneuriat social. Sauf qu'il arrive que ce soit un philanthrope plutôt que l'État qui le finance. Bill Young, un ancien dirigeant d'entreprise qui dit avoir gagné " plus d'argent que j'en ai besoin ", a créé Social Capital Partners, à Toronto. Cette firme aide des entreprises qui emploient des personnes en réinsertion sociale en leur offrant des prêts à de meilleurs taux d'intérêt. Pour l'instant, M. Young est le seul bailleur de fonds de Social Capital. Ces trois initiatives illustrent une nouvelle tendance en matière de philanthropie dont l'objectif est de soutenir non plus seulement le bien-être des populations défavorisés, mais aussi, et surtout, leur développement économique. " On voit l'émergence d'un modèle hybride, qui réconcilie les deux anciens modèles, l'un étant de faire des profits, peu importe l'impact social, et d'en redonner une partie à la communauté, et l'autre, d'investir dans des causes sociales ", a résumé l'animateur de l'atelier, Matthew Bishop, journaliste à The Economist. Cet article est tiré de visiondurable.com, via "Journal Les Affaires" du 4 au 10 octobre 2008.

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