jeudi 11 septembre 2008

Le don vu comme acte d’investissement




Nos 2 articles précédents (25 Août et 1er Septembre) ont révélé qu'il ne peut y avoir d'investissement socialement responsable véritablement efficace, sans unc certaine approche philanthropique.

Quand bien même le client fortuné écarterait toute idée de placement financier, le don est en lui-même une forme d'investissement réclamant une démarche similaire.

A l’inverse de l’acte de charité, souvent déclenchée par l'émotivité que procure l’image de la misère et de la détresse (cas typique du tsunami du 26.12.2006), la démarche adoptée par le donateur "nouvelle tendance" est semblable au raisonnement appliqué dans le cadre d’une décision d’investissement. Ce qui veut dire que le donateur va raisonner en terme de rendement (return).

Dans le cas d’un don, ce n’est bien évidemment pas un retour financier qu’il en attend, mais la maximisation d’un résultat social. La définition et la quantification de l’impact du don deviennent de ce fait l’objectif primordial, dans un contexte où le résultat et la performance s’imposent à tous les niveaux (on parle maintenant de venture philanthropie). Cette nouvelle expression de la philanthropie est renforcée par l’expansion d’une génération d’entrepreneurs plus jeunes et plus attentive aux problèmes de la société.

Le banquier confronté à une nouvelle demande
La philanthropie est bel et bien entrée - de façon inattendue et non discutable - dans la sphère de compétence du banquier, qui se voit désormais de plus en plus contraint d’intégrer dans son offre de service et de gestion des attentes d’un genre nouveau. Il doit même être prêt à faire éventuellement appel à des prestataires externes, car il est rare qu’il dispose en interne de l’expertise complète dans un domaine aussi particulier que l‘aide à la recherche de projets répondant aux préoccupations du client, la création d’ONG ou de fondations.

Le moment privilégié par défaut pour traiter de ce sujet est lors de la planification successorale. Mais de plus en plus, l’acte philanthropique s’exprime tout au long de la vie, ce qui traduit bien le fait que le client n’en fait plus seulement un geste de générosité de fin de vie, mais bien un acte d’investissement.

Le défi pour le banquier est aujourd’hui d’un type nouveau, car la philanthropie prend des formes d’expression de plus en plus diverses qui étendent potentiellement son champ de mise en œuvre au-delà de sa cible traditionnelle qu’est la clientèle très fortunée. Chacun à son niveau exprime des souhaits, soit de partage, soit tout simplement d’allocation de ressources à des fins dont l’objectif premier ne sera pas nécessairement la performance absolue, mais un rendement en adéquation avec certaines valeurs (rappelons que ce sont des communautés religieuses qui sont à l’origine de l’ISR).
Un tout cohérent s’appuyant sur deux facteurs: émotion et innovation
Les banques affichent aujourd’hui presque toutes au moins une offre ISR parmi leur gamme de produits, témoin d’un début d’adaptation aux attentes nouvelles d’une certaine catégorie de la clientèle. La tendance consistant aujourd’hui à segmenter la micro-finance, de l’ISR et de la philanthropie est néfaste pour la perception commune des intérêts que sont supposés défendre ces trois formes d’investissement. Cela peut même nuire au développement de chacun de ces segments, du fait de l’introduction d’une forme de concurrence non justifiée.

Philanthropie, micro-finance et ISR sont à considérer comme un tout cohérent et complémentaire. En banque privée, ils devraient former une palette commune de services, dans laquelle le client fera son choix en fonction de ses propres valeurs et convictions. Si l’on devait donc définir une terminologie commune à l’ensemble de ses nouveaux produits et services bancaires, il faudrait se rapporter au plus petit dénominateur commun: l’acte philanthropique.
D’un point de vue marketing et commercial, il a toujours paru de bon ton de ne pas mélanger philanthropie et investissement, alors que ce n’est pourtant pas antinomique. Que l’on parle d’ISR, de micro-finance ou de philanthropie, il n’y a aujourd’hui plus qu’un seul mot qui compte: le return. Celui-ci s’adapte suivant la circonstance: il sera soit en partie financier et en partie social (cas de l’ISR et de la micro-finance), soit totalement social (cas de la philanthropie). Une étude récente de PWC (Global Private Banking / Wealth Management Survey 2007) fait état de deux facteurs-clé de succès en banque privée: en premier lieu la faculté à porter la relation à un niveau émotionnel, pour identifier les véritables motivations du client ; en second lieu la capacité à innover pour traduire cette émotion en un service adapté aux attentes du client. Emotion et innovation: deux concepts incontournables, dès l’instant que la performance financière n’est plus l’unique attente du client. En fait, l’a-t-elle toujours été?

Aucun commentaire: